L’hiver est la saison de repos végétal, cette phase est aussi appelée dormance*. C’est le moment où nous pouvons apercevoir encore quelques fruits sauvages perchés au bout des branches, comme les cynorrhodons ou les prunelles par exemple. Ces fruits constituent une étape clé de la dissémination des graines, et donc de la survie de l’espèce. En cette période froide, on observe également les bourgeons, positionnés sur les branches nues, qui eux aussi sont essentiels à la pérennité de la plante. Pour apprendre à connaître les bourgeons et mettre un pied dans la botanique, je vous guide dans cet article.
Quels sont les différents types de bourgeons ?
Pour la plante, le bourgeon est un organe complexe dont nous simplifierons la définition ici : c’est un ensemble de très jeunes pièces foliaires ou florales, regroupées sur un axe extrêmement court, riche de cellules méristématiques*.
Ces précieux organes miniatures sont protégés par des écailles et un duvet cotonneux appelé bourre, d’où provient d’ailleurs le nom de bourgeon (du latin burra, bourre).
- Le bourgeon qui contient des pièces florales est communément appelé le bouton floral. Il donnera après éclosion une fleur et permettra donc la reproduction sexuée de la plante. Les fruits en assureront la pérennité.
- Le bourgeon qui contient les pièces foliaires est le bourgeon à bois. Il donnera un rameau* et des feuilles et permettra la croissance de la structure générale de la plante.
Le rameau porte des bourgeons à différents endroits :
- En haut de l’axe principal : bourgeon terminal, assure la croissance en longueur de la tige.
- Sur les côtés du rameau : bourgeon axillaire dont le fonctionnement détermine la croissance latérale de la plante.
Il existe de nombreux autres types de bourgeons, et ce sera l’objet d’un prochain article tant le sujet est dense. Passionné.e.s de botanique, encore un peu de patience !
Quel est leur rôle pour l’arbre ? Apprendre à connaître les bourgeons
La présence de ces organes miniatures, prêts à s’épanouir, permettra à l’arbre de disposer d’un équipement rapidement fonctionnel à l’arrivée du printemps et sa fameuse levée de dormance. Les bourgeons peuvent être élaborés l’année précédant leur éclosion. Il arrive même que certains bourgeons « attendent » plusieurs années le moment idéal pour s’ouvrir. Le débourrement d’un bourgeon sonne le début du printemps et l’éveil de la nature. C’est la suite logique du cycle de la vie de l’arbre : ces bourgeons deviennent alors des fleurs ou de nouvelles branches. Ils agissent comme un moteur pour la plante. Sans bourgeon, pas d’arbres et pas de forêt.
Comment reconnaître un bourgeon ?
Pour apprendre à connaître les bourgeons, vous pouvez partir à la recherche des bourgeons de frêne élevé (Fraxinus excelsior), très commun en France. Ses bourgeons sont facilement identifiables. Les bourgeons axillaires sont opposés deux à deux et ont un angle de 90° entre chacune de ces paires opposées.
➡️Pour en savoir plus sur le frêne, n’hésitez pas à parcourir la fiche dédiée à cet arbre.
Le bourgeon terminal est plus gros que les axillaires, et a la forme d’une pyramide déposée au sommet du rameau. L’aspect noir et velouté de ses bourgeons est très spécifique et vous mettra sur la voie ! Et enfin, vous pouvez également observer, et parfois la loupe sera nécessaire, ce que l’on appelle les cicatrices foliaires. C’est la marque laissée par la feuille après sa chute.
C’est personnellement quelque chose que j’aime beaucoup observer. Je suis fascinée par la disparité qui peut exister sur ce petit endroit, et ce qu’il révèle de la feuille qui se trouvait là avant. Dans le cas du frêne, la cicatrice foliaire est en forme de demi-cercle, et on peut observer la trace des vaisseaux qui assurent les échanges entre la feuille et le rameau.
Le frêne est un excellent professeur pour apprendre à reconnaître les bourgeons
Pour imager les différences claires et nettes qui peuvent exister entre les nombreux types de cicatrices foliaires, celle du noyer ci-contre est bien distincte de celles du frêne !
Lorsque l’on souhaite identifier un arbuste ou un arbre l’hiver, la cicatrice foliaire, la disposition des bourgeons, la forme et la couleur des écailles de ces derniers sont les principaux critères à observer.
Pourquoi utiliser les bourgeons en phytothérapie ?
Les bourgeons, comme toutes les autres parties d’une plante, contiennent de nombreuses molécules intéressantes pour la phytothérapie. La gemmothérapie consiste à utiliser spécifiquement les principes actifs contenus dans les bourgeons et tissus embryonnaires de la plante. Ces extraits sont obtenus par macération des bourgeons dans un mélange de glycérine, alcool et eau. Beaucoup de vertus leur sont attribuées.
Mon approche est principalement scientifique, et mon métier consiste en partie à expliquer les modes d’action de ces molécules sur notre organisme, lorsque cela est possible. Dans le cas de la gemmothérapie, les données sont principalement des observations actuelles et empiriques. Ce qui n’est absolument pas négligeable bien entendu. Ces informations sont essentielles et nécessaires, et font partie de la construction de nos savoirs et savoir-faire. En ce qui me concerne, ces éléments me permettent simplement d’émettre des hypothèses. Je trouve très intéressantes les propriétés allouées à certains macérâts de bourgeons, comme pistes de réflexion. La question de la capacité des composants si particuliers des tissus embryonnaires à agir sur notre organisme m’intrigue particulièrement.
Je suis impatiente de pouvoir lire et apprendre les prochaines études qui seront faites sur ces extraits ! Et si vous avez des sources sur ce thème, n’hésitez pas à me le faire savoir, je serai ravie de les étudier.
À travers cet article, j’ai souhaité vous donner quelques bases solides pour apprendre à connaître les bourgeons. Pour savoir les différencier, les observer et mieux comprendre leur rôle dans le fonctionnement biologique des arbres. L’univers des plantes est vaste et pour mieux les comprendre, il faut tout d’abord apprendre à les regarder.
Bonnes observations à toutes et à tous !
Lexique botanique
Dormance : en physiologie végétale, la dormance est un état physiologique » permettant à un organisme vivant de cesser tout ou une partie de son activité pendant la mauvaise saison sous l’effet du froid, de la sécheresse, d’un éclairement insuffisant » (George 1970).
Rameau : En général, le rameau est une formation ayant une structure de tige, née d’un bourgeon porté par un axe principal.
Cellules méristématiques : cellules indifférenciées (dont le devenir n’est pas encore décidé) en division. Forment le tissu embryonnaire.
Sources
-Dictionnaire de Botanique de Bernard Boullard – Édition Ellipses -1998
-Formation en sur la reconnaissance des arbres et arbustes en hiver délivrée par Gentiana.