Dans le vaste monde de la phytothérapie, on retrouve la famille des compléments alimentaires parmi les infusions, alcoolature, et autres remèdes naturels. Pourquoi certaines plantes médicinales se retrouvent dans des compléments alimentaires ? Et donc quelle est la différence entre un médicament et un complément alimentaire s’ils peuvent contenir tous les deux plantes médicinales ? Les compléments alimentaires peuvent ils soigner ?
Les formes sous lesquelles on peut utiliser les plantes médicinales sont vastes, et la législation qui va avec est tout aussi étendue. Eclaircissons tout cela !
Compléments alimentaires vs médicaments
La particularité des compléments alimentaires par rapport aux médicaments, c’est leur législation. Les médicaments doivent faire l’objet d’une AMM (Autorisation de Mise sur le Marché). Les compléments alimentaires, quant à eux, doivent être déclarés à la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).
La différence est énorme : l’AMM requiert la validation de beaucoup de critères, comme la démonstration d’une efficacité, les effets indésirables possibles, la qualité du contenu. Il faut réaliser des essais pré-cliniques et cliniques. Tout cela requiert un énorme budget et beaucoup de temps.
Une matière première jamais identique
Par ailleurs, il est très compliqué de démontrer les effets thérapeutiques des plantes. Ce sont des organismes vivants qui s’adaptent à leur milieu et qui n’auront pas la même composition s’ils se développent sous une latitude ou un sol différent. Par essence, les plantes contiennent des milliers de composants différents qu’il est très difficile d’isoler et d’analyser. Ajoutez à cela la variation de traitements que les plantes subissent depuis leur récolte jusqu’à leur mise en gélule, en passant par le transport, stockage, séchage et/ou broyage… A cette réalité est lié le prix que coûte les analyses du contenu des préparations à base de plantes médicinales. La qualité et la traçabilité sont difficiles à garantir.
Une législation qui fait la différence entre plantes médicinales
En parallèle de cette difficulté à démontrer un effet thérapeutique et une teneur en principes actifs des préparations à base de plantes médicinales une directive a été adoptées. Cette directive Européenne 2004-24 CE simplifie l’enregistrement de certaines plantes médicinales en tant que complément alimentaire : “La présente directive permet aux produits non médicamenteux à base de plantes satisfaisant aux critères de la législation sur les denrées alimentaires d’être régis, dans la Communauté, par cette législation.”
Il en résulte que les compléments alimentaires peuvent contenir des plantes ou des préparations à base de plantes si elles n’ont pas de propriétés pharmacologiques et ne sont pas destinées à un usage exclusivement thérapeutique. Cela offre une plus grande liberté aux fabricants et revendeurs de compléments alimentaires à base de plantes. Depuis que cette directive a été adoptée, les entreprises qui commercialisent les plantes médicinales ont tout simplement changé leur statut : ils ont reclassé une partie de leurs produits initialement dans la catégorie « médicaments » dans la catégorie de complément alimentaire ou cosmétique.
Les impacts de la loi sur le marché et le contenu des compléments alimentaires à base de plantes médicinales
Le statut de complément alimentaire est désormais le statut le plus répandu pour les plantes médicinales… L’impact sur le marché, l’environnement et la santé est énorme.
La qualité des compléments alimentaires à base de plantes dépend alors du fabricant. Ils ne font pas l’objet d’un contrôle externe, et les problèmes des ressources et de la traçabilité sont sur le devant de la scène.
La pression économique, la demande croissante des consommateurs, les conditions des cueilleurs et cueilleuses dans les pays en développement (d’où viennent beaucoup de plantes médicinales qui font rêver les Occidentaux) font que les ressources disparaissent, les cueilleurs et cueilleuses sont dans des situations précaires. Et en bout de chaîne, le contenu des compléments alimentaires n’est pas garanti. Il existe malheureusement des intoxications avec des compléments alimentaires frelatés, dont le contenu n’est pas la bonne plante ou est contaminé.
Si vous êtes consommateurs et consommatrices de plantes médicinales sous forme de gélules, gummies, ampoules, capsules, comprimés, poudres, vendues en tant que compléments alimentaires, je vous invite très fortement à lire l’ouvrage d’Aline Mercan : le manuel de phytothérapie écoresponsable, se soigner sans piller la planète.
Aline Mercan donne notamment des exemples concrets de parcours de plantes médicinales exotiques jusqu’à nos pharmacies familiales. Cette médecin phytothérapeute et ethnobotaniste propose également une liste d’alternatives avec des plantes plus locales et qui ne sont pas en danger d’extinction. Cet ouvrage explique en profondeur l’état du marché et donne une vision globale du marché mondial des plantes médicinales.
Pourquoi prendre des compléments alimentaires ?
Rappelez-vous que bien souvent, la meilleure et première des choses à faire et de ré-équilibrer son alimentation, et que les nutriments sont bien mieux absorbés dans leur matrice qu’isolés dans des compléments alimentaires. Il est également impératif de consulter un.e professionnel.le de la santé en amont pour établir un diagnostic et ne pas perdre de temps face à une éventuelle pathologie.
Si vous souhaitez approfondir vos connaissances dans les apports nutritifs des plantes sauvages comestibles et médicinales, leur reconnaissance et la cueillette, nous vous proposons un cycle de plusieurs week-end chaque année. Consultez les informations dans l’article sur la formation complète plantes sauvages comestibles.
Sources
–https://ansm.sante.fr/page/autorisation-de-mise-sur-le-marche-pour-les-medicaments
–Dimplôme Universitaire d’ethnobotanique appliquée 2023
-Le manuel de phytothérapie écoresponsable, se soigner sans piller la planète, Editions Terre vivante, 2021 Aline Mercan
–https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=CELEX:32004L0024